Chapitre 9

 

Si j’arrivais à me débarrasser du fantôme qui harcelait Jaime, j’étais censée aller l’attendre dans son appartement. Quand je trouvai l’endroit, je l’attendis effectivement… une bonne dizaine de minutes. Puis je me mis en quête d’indices m’indiquant où elle était partie. Je trouvai la réponse sur le calendrier : elle avait été invitée à une soirée chez un conseiller municipal. Ce qui ne me renseignait pas tellement, mais j’eus davantage de chance à la deuxième tentative, où je trouvai un petit tas d’invitations sur son bureau.

Évidemment, celle de ce soir-là n’était pas au sommet de la pile. Ç’aurait été trop facile. Je fus donc obligée de les passer toutes en revue à l’aide de mes pouvoirs d’Aspicio. Ce qui me demanda un peu de boulot – j’aurais pu très facilement percer un judas à travers la pile et le bureau, mais il était bien plus ardu de les parcourir une couche à la fois. J’y travaillais depuis une demi-heure environ quand je trouvai la bonne invitation. Ce qui me fournit une adresse. Puis il me fallut regagner ma maison de Savannah, prendre mon atlas des villes et localiser l’adresse en question. Comme je ne connaissais que trois codes de voyage pour Chicago, l’emplacement le plus proche que je puisse atteindre se trouvait à neuf kilomètres. Ça aurait pu être pire, mais ça faisait une trotte.

Quand j’arrivai enfin à destination, il était minuit passé. La rue était remplie de voitures garées et de gens qui sortaient de cette maison, assez impatients de trouver de l’air frais pour braver le froid – ou trop saouls pour le remarquer.

Je trouvai Jaime dans la salle à manger, en train de parler à une quinquagénaire à la tenue et à la coiffure immaculées. J’avais retenu la leçon de l’émission télévisée. Ou plutôt compris que Jaime avait raison au sujet des fantômes qui lui sautaient dessus en plein milieu d’une conversation avec des vivants. Je m’attardai donc hors de son champ de vision et attendis. Attendis encore. Attendis trente secondes de plus, puis décidai de m’approcher furtivement et de voir si j’arrivais à attirer poliment son attention.

Tandis que j’approchais, je distinguai mieux la compagne de Jaime. Même de derrière, tout en elle trahissait la professionnelle des classes supérieures, avec la posture parfaite, un tailleur de haute couture et des cheveux courts artistiquement parsemés d’argent, ce qui créait une impression d’entrée gracieuse dans la maturité. Cadre ou avocate, peut-être même la conseillère qui donnait cette fête. Sa posture et ses gestes trahissaient la confiance d’une femme qui a trouvé sa place dans la vie et s’y est installée en toute sérénité. Mais quand je l’eus assez contournée pour voir son visage, il me raconta une tout autre histoire. Ses rides profondes me firent ajouter une décennie à mon estimation initiale de son âge. Ses yeux étaient rouges mais secs et son visage tendu, comme si elle luttait pour garder son sang-froid.

— Non, dit Jaime, je comprends parfaitement. Croyez-moi, ce n’est pas une question de…

— C’est l’argent ? Ce n’est pas un problème, Jaime. Je vous l’ai déjà dit et j’étais sincère…

— Ce n’est pas ça.

Les mains de la femme se crispèrent sur une serviette tachée de nourriture.

— Pardonnez-moi. Je ne voulais pas vous insulter…

— Vous ne l’avez pas fait. Mais je ne peux pas vous aider. Honnêtement, si je pouvais retrouver votre fille…

— Je ne veux pas que vous la retrouviez. Simplement que vous me disiez si elle est là. De l’autre côté. J’ai seulement besoin… Ça fait si longtemps. J’ai besoin de savoir.

Jaime arracha son regard à celui de l’autre femme et ses yeux se voilèrent.

— Je le comprends très bien. Mais ça ne marche pas comme ça.

— On pourrait essayer. Ça ne ferait pas de mal, n’est-ce pas ?

— Si, dans la mesure où ça vous donnerait de faux espoirs. Je… je suis désolée. Je dois…

Elle marmonna quelque chose et fila. Je la suivis à travers la pièce voisine puis la porte de derrière. Elle s’empressa de dépasser les personnes rassemblées sur le porche et s’avança dans la cour vide, ne s’arrêtant que lorsqu’elle eut atteint la clôture de derrière qui l’empêcha d’aller plus loin, puis elle se pencha contre elle en frissonnant.

— Ça ne doit pas être très marrant quand on vous demande de faire ça, lui dis-je.

Elle leva vivement la tête, puis m’aperçut. Je m’approchai.

— Vous savez que vous ne pouvez pas l’aider. Moi, je sais que vous ne pouvez pas. Mais rien de ce que vous direz ne va l’en convaincre. Vous avez fait de votre mieux.

Jaime entoura sa poitrine de ses deux bras et ne répondit rien.

— Je me suis débarrassée de votre maniaque sans tête, lui dis-je. Si jamais il revient, appelez-moi, mais je crois qu’il ne le fera pas.

Elle hocha la tête, frissonnant toujours si fort que je l’entendais claquer des dents.

— Vous voulez aller quelque part où il fait plus chaud ? demandai-je.

— Je n’ai pas froid. C’est seulement… (Elle secoua la tête, puis tout son corps et se redressa.) Merci pour votre aide. Avec le fantôme qui me harcelait. Je vous dois une faveur.

— Et je crois que vous aurez l’occasion de me la rendre assez vite. Je ne sais pas exactement de quoi j’aurai besoin ni quand, mais on devrait se mettre d’accord sur un moyen de vous trouver quand j’en aurai besoin.

Elle acquiesça. Les Parques me laissèrent tout juste le temps de mettre les détails au point avec Jaime avant d’envoyer les Traqueurs à ma recherche.

 

Ils me déposèrent dans un vestibule de la taille d’un gymnase scolaire. Il était de marbre blanc, comme la salle du trône, mais sans meubles ni décoration : un simple lieu de transit.

Pas mal de gens le traversaient en ce moment même. Des ecto-fonctionnaires, ceux qui garantissent la bonne marche de notre monde. Ce sont de purs esprits, des créatures qui n’ont jamais habité le monde des vivants, et ils ressemblent davantage que nous aux fantômes classiques. Ils sont entièrement blancs. Même leurs iris sont d’un bleu si pâle qu’on n’en remarquerait pas la couleur s’ils ne se détachaient sur le blanc de leurs yeux. Leurs habits comme leur peau sont presque translucides. S’ils passent devant quelque chose, on en distingue les contours sombres derrière eux.

Les ecto-fonctionnaires ne peuvent pas parler. Ne peuvent pas ou ne veulent pas, personne ne sait au juste. Ils peuvent communiquer par télépathie, mais n’émettent jamais la moindre syllabe quand un geste peut suffire.

Tandis que je traversais le vestibule, j’étudiai les directions possibles. Une chose était sûre, il y en avait beaucoup trop. Au moins une dizaine de portes, sans parler du grand escalier en voûte à chacune des extrémités. Et pas de plan du bâtiment pour nous aider à nous y repérer. Pas même de panneaux discrets au-dessus des portes.

— Bon, marmonnai-je, qu’est-ce que je fous ici et où est-ce que je suis censée aller ?

Sans modifier aucunement leur allure, les quatre ecto-fonctionnaires les plus proches de moi levèrent leurs bras translucides pour désigner l’escalier nord-ouest.

— Et qu’est-ce qu’il y a là-haut ? demandai-je.

Une image apparut dans ma tête. Un ange ailé. J’ignorais si c’étaient les fonctionnaires qui l’avaient placée là ou si j’avais tiré cette conclusion moi-même, mais je les remerciai d’un signe de tête et me dirigeai vers l’escalier.

 

Il s’arrêtait à un palier muni de trois portes et dont partait un escalier plus étroit qui montait en colimaçon. Alors que je me dirigeais vers la porte la plus proche, un ecto-fonctionnaire de passage désigna le haut.

— Merci, lui dis-je.

Je gravis l’autre escalier, trouvai trois autres portes ainsi qu’un autre escalier encore plus étroit. Cette fois encore, un fonctionnaire m’indiqua le chemin. Cette fois encore, il fallait monter. Deux paliers supplémentaires. Deux nouvelles séries de portes plus un escalier. Deux autres ecto-fonctionnaires serviables. Je sus que j’avais atteint la tanière de l’ange quand il ne me resta qu’un seul choix possible : une porte blanche.

Au-delà de cette porte se trouvait un ange. Un vrai. Je n’en avais encore jamais rencontré. Dans le monde des esprits, on parlait rarement des anges, et seulement sur un ton entre raillerie et déférence, comme si nous autres, les créatures surnaturelles, voulions nous moquer d’eux sans être bien sûres d’oser.

Les anges sont les messagers terrestres des Parques et de leurs semblables. De temps en temps, on entendait parler d’un ange qu’on envoyait régler un problème sur terre. On ne savait jamais quel était le problème – sans doute quelque malheur tire-larmes tout droit sorti d’un épisode des Anges du bonheur. Les anges descendaient sur terre en voletant, répandaient la paix, la joie et la bonne volonté comme de la poussière de fée, rétablissaient l’ordre du cosmos avant la coupure de pub et regagnaient leur nuage à coups d’aile pour attendre la quasi-catastrophe suivante.

Quant à savoir pourquoi les Parques envoyaient un ange pour attraper cette salope meurtrière de semi-démone, ça m’échappait. C’était comme envoyer un papillon à la poursuite d’un faucon. La nixe avait fait pile ce que j’aurais attendu : elle l’avait bouffé tout cru pour le recracher en morceaux. Mais, comme l’avaient admis les Parques, elles ignoraient comment affronter la nixe. Quand elle s’était échappée, leur première réaction, fort compréhensible, avait consisté à lui envoyer leurs messagers divins.

Lorsque je tendis la main pour frapper à la porte, une décharge d’énergie me traversa. Quand je retrouvai mon équilibre, je regardai ma main et la pliai. Pas de douleur… rien que de la surprise. Un choc mental.

Je tendis prudemment les doigts vers la porte, m’attendant à recevoir une nouvelle décharge. Au lieu de quoi une vague d’émotion indéfinissable m’envahit, amorphe mais distinctement négative. Une frontière magique. Au lieu de me repousser physiquement, elle déclenchait une voix inconsciente qui me disait : « Tu n’as aucune envie d’entrer là-dedans. »

Sauf que j’en avais envie. Il le fallait.

J’ignorai la sensation et frappai. L’espace d’une seconde, tout s’assombrit. Avant même que je puisse penser « Oh, merde », les ténèbres s’évaporèrent. La porte avait disparu. Le vestibule aussi. Je me tenais dans une autre pièce blanche. Mais celle-ci paraissait bâtie de brique puis enduite de plâtre et blanchie à la chaux, au point que le motif initial des briques était à peine visible. Le sol aussi paraissait fait de brique, mais plus sombre et au motif nettement apparent. Au centre se trouvait un large tapis de roseaux entouré de plusieurs chaises de bois à dossier haut, de quelques tables et d’une méridienne où s’empilaient des oreillers brodés.

Une fenêtre occupait tout le mur d’en face. Au-delà se trouvait un désert constellé de pyramides. Une illusion, supposai-je, mais jolie néanmoins. Si les gens qui dirigeaient cet hôpital psychiatrique avaient autant réfléchi à l’environnement de leurs patients, les hanteurs n’auraient sans doute pas trouvé en eux des proies si faciles.

— Y a quelqu’un ? appelai-je.

Pas de réponse.

Alors que je me retournais pour chercher une porte, quelque chose bougea à la base de la fenêtre. Je regardai autour du divan. De l’autre côté, recroquevillée près de la fenêtre, était assise une femme qui me tournait le dos. Une ample robe argentée noyait sa silhouette minuscule. Elle ne devait pas mesurer plus de un mètre cinquante. Des poignets aussi minces que des pattes d’oiseau dépassaient de ses vastes manches. Des cheveux noirs lui cascadaient dans le dos, frôlant le sol de leurs pointes. Je ne voyais pas d’ailes, mais cette robe aurait pu en dissimuler en plus de toute une parure de bagages. Une chose était sûre : jamais je n’aurais envoyé cette petite chose fragile à la poursuite d’une nixe.

— Janah ? demandai-je doucement.

Elle ne bougea pas. Je traversai furtivement la pièce, avançant lentement pour ne pas la faire sursauter.

— Janah ?

Elle leva la tête et se retourna. D’immenses yeux marron se rivèrent aux miens. Tellement vides de pensées ou d’émotions que je détournai le regard par réflexe, comme s’ils pouvaient aspirer dans les miens ce qui leur manquait.

Je m’accroupis à son niveau, gardant quelques mètres de distance.

— Janah, je m’appelle Eve. Je ne vais pas vous faire de mal. Je viens seulement vous demander…

Elle bondit. Un cri de puma résonna dans toute la pièce. Avant que je puisse bouger – avant que je puisse même penser à le faire – elle me fonça dessus. Je basculai en arrière et ma tête heurta violemment le sol. Janah agrippa mes longs cheveux à deux mains, se redressa d’un bond et me projeta vers un groupe d’urnes. Il y eut un bruit de poterie brisée et j’allai voler au-dessus du divan.

— Div farzand, rugit Janah.

Elle chargea. Je me redressai bien vite et me précipitai hors d’atteinte. Quand je lançai un sort d’entrave, il ne la ralentit même pas. Je bondis sur les coussins du divan puis sautai sur la table. Alors qu’elle fonçait sur moi, je tentai de l’aveugler. Soit ça ne marchait pas sur les anges, soit elle était effectivement aveuglée… et s’en contrefichait.

Je fis volte-face pour un coup de pied latéral, mais une barrière mentale arrêta mon pied en plein vol. Donner un coup de pied à un ange dément ? Mon code moral était peut-être quelque peu limité, mais ça l’aurait enfreint sur deux points.

Je bondis sur une table et cherchai une porte autour de moi. Je n’en vis aucune. La seule issue pour quitter cette cage dorée était la fenêtre, et je savais qu’il s’agissait d’une illusion. Ici, les murs étaient des murs. Même les fantômes ne pouvaient les traverser.

Tandis que je bondissais de nouveau sur la table basse, je récitai l’incantation qui me ramènerait chez moi. Elle ne marcha pas. J’en essayai une autre. Qui ne marcha pas davantage. Quels que soient les tours de passe-passe auxquels recouraient les Parques dans la cellule de cet ange, ils étaient manifestement conçus pour l’y garder enfermée. Tout bien réfléchi, ça ne paraissait pas une si mauvaise idée. Si seulement je ne l’étais pas aussi par la même occasion.

— Yâflan dâdvari ! me cracha-t-elle.

— Ah ouais ? Toi-même, pauvre tarée.

Elle s’arrêta et s’immobilisa totalement. Puis elle recula, leva les bras et le visage vers le plafond en un geste de supplication et commença à réciter une incantation.

— Hé, je ne disais pas ça sérieusement, lui lançai-je en m’avançant vers le bord de la table. Si tu appelles les Parques, très bien. Ce sont elles qui m’envoient.

Quelque chose miroita dans les mains levées de Janah, se matérialisant lentement à partir du néant. Ça ressemblait à un bout de métal d’au moins un mètre vingt de long, si brillant qu’il paraissait dégager une lueur. Le long du bord étaient gravées des inscriptions dans un alphabet qui me paraissait vaguement familier.

Tandis que l’objet se solidifiait, une poignée brunie apparut à une extrémité. Janah referma les doigts dessus, yeux clos, lèvres entrouvertes, comme si elle se glissait dans un gant fait du cuir le plus doux qui soit. Elle éleva l’objet au-dessus de sa tête – la lame de la plus grosse putain d’épée que j’aie jamais vue.

— Oh la vache !

Les mots s’échappaient toujours de mes lèvres lorsque l’épée fendit les pieds de la table comme des bâtonnets de beurre tiède. Quand mon perchoir s’effondra, je parvins à me réfugier sur un fauteuil. Quand je plongeai par-dessus son dossier, l’épée dévia en direction de mes genoux. Je heurtai le sol. La pointe de la lame transperça le cuir à deux centimètres de mon épaule.

Janah bondit sur le fauteuil et plongea l’épée dans ma direction. Fantôme ou pas, je m’empressai de déguerpir. On a beau se croire invulnérable, lorsqu’on se trouve face à un ange psychotique armé d’une épée de samouraï de un mètre vingt, le moment est mal choisi pour mettre cette théorie à l’épreuve.

Je détalai à travers la pièce, jetant des sorts tout en courant. Aucun d’entre eux ne fonctionna.

— Fille de démon ! cria Janah.

Je ne pouvais pas la contredire.

— Infidèle !

Ça par contre, ça se discutait, mais je pouvais le lui accorder.

— Putain du diable !

Alors ça, c’était déplacé. Je pivotai pour lui balancer un coup de pied. Cette fois, ma conscience se tint tranquille et laissa mon pied voler. J’atteignis Janah au poignet. Elle eut un hoquet. L’épée vola de sa main et atterrit sur le sol en cliquetant. On plongea toutes deux vers elle. Tandis que les doigts de Janah touchaient la poignée, je la balançai hors de sa portée, puis me tortillai pour saisir la lame.

Une douleur brûlante se diffusa dans tout mon bras. Je hurlai sous l’effet du choc autant que de la douleur. En trois ans, je n’avais jamais souffert ne serait-ce qu’en me cognant l’orteil, et je ne m’étais plus attendue à éprouver de douleur, si bien que, lorsque la lame m’embrasa le bras, je lâchai un hurlement à faire trembler le toit. Mais je ne lâchai pas prise. Je soulevai l’épée par la lame tandis que des élancements de douleur me parcouraient toujours le bras.

Puis tout devint noir.

— Je crois que vous étiez censée m’attendre.

Une voix masculine si chaude que j’en eus des frissons le long du dos. Je me retournai. J’étais assise à terre devant la porte blanche de Janah.

Devant moi se dressait une paire de jambes vêtues d’un pantalon brun clair aux plis plus tranchants que l’épée de Janah. Mon regard remonta jusqu’à une chemise verte, puis plus haut encore, vers une paire d’yeux de la même nuance émeraude que la chemise. Ils étaient enchâssés dans un visage à la peau olivâtre, au nez fort et aux lèvres charnues qui tremblaient sous l’effet d’une hilarité à peine contenue. Des cheveux noirs emmêlés lui retombaient sur le front.

L’homme tendit la main pour m’aider à me relever. Sa poigne était ferme et chaude, presque brûlante.

— Merci pour le coup de main, lui dis-je, mais je crois que je maîtrisais la situation.

Son sourire s’épanouit.

— J’ai vu. (Il désigna la porte du menton.) Vous ne deviez pas vous attendre à ça.

— Sans blague. (Je baissai les yeux vers ma main. Elle paraissait en bon état, et la douleur avait cessé dès l’instant où j’avais lâché la lame.) Alors c’est un ange ?

— De métier, pas de sang. C’est un fantôme, comme vous. Ainsi qu’une sorcière… et c’est sans doute pour cette raison qu’elle vous a quelque peu épargnée. (Il tendit la main.) Trsiel.

Je supposais qu’il venait de se présenter, mais ça ne ressemblait à aucun nom – ni à aucun mot – que j’aie déjà entendu. Je réussis à m’empêcher de lâcher un « Hein ? » pas très poli, mais mon expression était éloquente.

— Tré-si-el, dit-il.

Sa prononciation phonétique n’était pas tout à fait la même que la première fois, mais c’était ce que ma langue pouvait produire de plus proche.

— On doit souvent vous demander de l’épeler, fis-je remarquer.

Il éclata de rire.

— Ce serait certainement le cas… si j’en avais jamais besoin. Je ne suis pas un fantôme.

— Ah bon ? dis-je en le jaugeant de la tête aux pieds, le plus discrètement possible.

— Un ange, dit-il. De sang pur.

— Un ange ? Sans ailes, hein ?

Nouveau rire sonore.

— Désolé de vous décevoir. Mais donner des ailes à un ange, ce serait comme attacher un cheval à une voiture. Il est beaucoup plus rapide de se téléporter que de voltiger.

— C’est vrai. (Je jetai un coup d’œil à la porte de Janah.) Mais ça ne marche pas pour elle, hein ? Ou c’est simplement à cause de la barrière anti-magie ?

— Un peu des deux. Ça ne marche pas toujours non plus pour les sangs purs. Il y a des endroits… (Son visage s’assombrit, mais il haussa simplement les épaules.) Même les sangs purs peuvent se retrouver pris au piège. Comme Zadkiel.

Je hochai la tête.

— Le dernier parti à la poursuite de la nixe.

— Normalement, il devrait être là pour vous aider. C’est son boulot de donner un coup de main pour les quêtes inaugurales. Mais comme ça ne lui est pas possible pour d’évidentes raisons, on m’a demandé de le remplacer. Je vais vous aider pour tout ce qui peut poser problème aux individus qui ne sont pas des anges, comme parler à Janah.

— Alors c’est ça son problème ? Maintenant qu’elle est devenue un ange, elle n’aime plus parler aux autres fantômes ?

— Ce n’est pas ça. Elle a repéré le sang de démon en vous. Son cerveau a des ratés, il fait les connexions de travers, surtout face à tout ce qui peut lui rappeler la nixe.

— Elle a perçu un démon et vu un ennemi.

Il hocha la tête.

— Elle me fait aussi le coup de temps en temps.

Je fronçai les sourcils.

— À cause du sang de démon, précisa-t-il.

— Je croyais que vous disiez être…

— Les démons, les anges, c’est du pareil au même si on remonte assez loin ou si on creuse assez profond. Mais je vous conseille de ne pas le clamer trop fort. Certains n’apprécient pas qu’on le leur rappelle. Quand Janah nous regarde, vous et moi, elle voit des démons, ce qui représente pour elle le seul démon qu’elle ne peut oublier : la nixe à cause de laquelle elle se trouve là. Mais en règle générale, j’arrive à communiquer avec elle. Prête pour une nouvelle tentative ?

— Lâchez la bête.

Hantise
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